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Ce mois-ci, je dois vous mentionner que j’ai décidé d’ouvrir les valves de la fantaisie. Vous voilà avertis!
C’est l’histoire d’un homme, à la quête d’un sens à sa vie. Tant qu’à choisir une quête pour un personnage, pourquoi ne pas choisir la quête ultime. Trouver un sens à sa vie.
Il part à l’aventure, avec bâton, baluchon, brosse à dent et carte de débit. Ouin sa blonde lui a dit : « oublie pas d’acheter du lait en revenant! ».
Il a toujours su qu’un jour, il allait rencontrer quelqu’un qui l’aiderait à trouver sa mission. C’est par une rencontre mémorable que ça allait se faire.
Il marche, marche et marche encore.
Arrive un moment où la route se divise en deux à un carrefour. À gauche : beau chemin pavé avec des fleurs et des papillons. Au loin, il voit l’enseigne du dépanneur. De l’autre, un sous-bois inquiétant plein de racines et de bruits étranges.
Bien entendu, il prend le chemin douteux. Ça ne fait pas de sens, mais ça fait tellement une meilleure histoire! En plus, il n’est que 20 h 30, le couvre-feu est à 21 h 30. « J’ai encore du temps » se dit-il.
Il s’enfonce dans la forêt d’épinette. Il marche et marche mais plus il avance, plus la forêt se fait dense. Juste au moment où il se convainc de faire demi-tour, apparaît, comme par hasard, une lueur devant lui. Plus il s’approche, plus il reconnaît les traits d’une petite cabane de bois, c’est une petite chaumière chaleureuse et invitante.
Il cogne à la porte. Aucune réponse.
Comme c’est intriguant. Il entre. Doucement, comme dans les films.
À sa gauche, un poêle à bois. Dans le poêle à bois un feu. Sur le poêle à bois, un chaudron, dans le chaudron un potage. Un potage dans le chaudron marilon marilé un potage dans le chaudron marilon dondé!
Il se dit : « Il y a clairement quelqu’un de bienveillant qui habite ici. C’est assurément la rencontre que j’attends depuis trop longtemps. Sûrement une vieille dame, une mamie. Une ancienne championne de lutte ou gouvernante de l’armée de l’air. Ou encore mieux une autochtone, depuis le temps que je veux me rapprocher des Premiers Peuples. Ah oui, une femme au passé riche, remplit d’enseignements. »
Il se prépare des petites phrases pour quand la propriétaire des lieux va arriver, pour s’excuser. Se dit qu’il pourra mettre ça sur le dos du couvre-feu. Il commençait à se faire tard, il était perdu dans la nuit.
Il s’endort.
Au petit matin, en ouvrant les yeux, alors que sa vision était encore floue, se dessine devant lui une silhouette. Un objet long dans la main. Est-ce un bâton pour le frapper? Un fusil pour le tuer? Non, c’est un tuyau d’aspirateur.
Devant lui, un petit homme. Quelconque. Avec des habits ordinaires. Aucun trait physique particulier autre qu’il est quand même petit et qu’il porte des lunettes.
« Je suis content que tu sois réveillé. C’est l’heure de passer l’aspirateur. »
Il explique qu’il est un vendeur d’aspirateur. « Ça existe encore ce métier? » s’étonne notre personnage principal.
« Bien entendu. On n’est plus très nombreux mais on se tient. On est tellement passionnés. À chaque fois qu’il y a un nouveau modèle on s’envoie des photos. »
Là, à ce moment-ci, mon personnage est vraiment fâché que j’aie mis sur sa route un vendeur de balayeuse, et pas un vieux sage… au pire une sorcière, il aurait fait avec.
Pendant une heure, le petit homme passe l’aspirateur tout en parlant très fort pour que notre ami ne perde pas un mot de son laïus. Il lui vante les qualités de ce dernier modèle, ultra léger et performant.
Après avoir écouté sagement le petit homme, notre ami a repris son bâton, ses deuils, ses peines et ses guenilles et il entreprit la route du retour.
Il imaginait bien le visage de sa blonde qui allait se moquer de lui quand il lui raconterait cette histoire. C’est vrai que c’est peut-être un peu ridicule cette obsession qu’il a de vouloir trouver un sens à sa vie par une rencontre mémorable.
Au dépanneur, au moment de payer, il fouille dans sa poche. Il y trouve un petit papier.
Tu sais, la vie, c’est comme un aspirateur. Des fois, il faut que tu fasses du ménage. Et si tu ne fais pas attention aux petites choses de la vie, tu vas les aspirer par mégarde.
Il arrive chez lui. « Hé, ma blonde, je t’ai pris des smarties! »